L’instinct musical

Pour reproduire un grave qui descend profondément sous un faible volume, tenant dans un rectangle au sol de seulement 22 × 23 cm, la solution de la charge isobarique a fait ses preuves chez les constructeurs britanniques. Neat Acoustics a la bonne idée de l’adopter sur la colonne Momentum J6, mariée à un tweeter AMT, pour une cohérence sonore intégrale.

Les Neat Acoustics de la série Classic avaient étalé leurs vertus musicales dans Haute Fidélité, dont la Petite (n° 265) puis l’Elite (n° 266). Inspirée du haut de gamme Ultimatum XL6, qui embarque 6 haut-parleurs dans une ébénisterie en multiplis de bouleau, ce modèle J6 à 2,5 voies est construit en MDF, plus économique mais également parfaitement rigide, en reprenant des éléments de feu la Momentum SX5i.

Détail de la plus haute importance : Bob Surgeoner, qui fonda Neat en 1989, est avant tout un musicien autodidacte, qui a passé la majeure partie de sa vie à jouer de la musique de tous styles : blues, rock, jazz, folk, country et bluegrass, avec pour prédilection le tuba. Mais il s’intéresse également à l’électronique et développe une passion pour la reproduction de la musique enregistrée. Nul doute que cette sensibilité musicale porte ses fruits chez Neat.

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ISOBARIC

La J6 adopte un véritable petit caisson de grave intégré à l’enceinte, constitué d’une charge isobarique qui a fait les beaux jours de Linn, marque anglaise ayant conçu ses célèbres enceintes en utilisant ce procédé (DMS, PMS, Sara).

Inventé par Harry Olson dans les années 1950, c’est un simulateur de charge infinie qui consiste à faire fonctionner ensemble deux haut-parleurs identiques l’un derrière l’autre, avec un volume clos entre eux. « Isobarique » signifie pression constante en référence à l’air emprisonné entre les deux haut-parleurs.

L’un rayonnera vers l’extérieur tandis que l’autre voit son rayonnement amorti à l’intérieur. Le niveau sonore et la bande passante restent identiques à l’utilisation d’un seul haut-parleur, sans modification de la FS (fréquence de résonance à l’air libre) ou du QTS (facteur de qualité totale), seul le VAS (volume de compliance équivalent) est divisé par 2, ce qui permet de réduire la taille du coffret par deux, hors charge elle-même. Le but est de minimiser la distorsion tout en linéarisant l’élongation par l’asymétrie de déplacement.

JET 6

Donnant son nom à ce modèle Neat, c’est la référence du nouveau tweeter AMT Elac de 6e génération apparu en 1993, conçu et dessiné à Kiel en Allemagne.

L’avantage de la technologie AMT, pour Air Motion Transformer (transformateur du mouvement de l’air) inventée par le Dr Oskar Heil au début des années 1970, est que la membrane pliée en accordéon déplace l’air latéralement dans un mouvement perpendiculaire avec une célérité incroyable, le son se diffusant en dipôle.

Le tweeter JET 6 Elac, capable de monter jusqu’à 50 kHz avec un minimum de distorsion, est couplé à un médium-grave de 168 mm, dernière version du R3 Neat au cône en papier dopé, le même que celui utilisé dans la gamme phare Ultimatum.

Il dispose d’une pièce de phase en aluminium et s’intègre dans un coffret à deux voies à part entière dont l’évent débouche à l’arrière, séparé de la partie inférieure traitant les très basses fréquences. Il est fixé ainsi que le tweeter sur la face avant épaisse qui apporte une touche d’originalité grâce aux angles biseautés, les découplant efficacement de la caisse.

Deux haut-parleurs de 170 mm sont cachés dans le baffle inférieur, orientés vers le bas dans le caisson séparé en charge infinie. De part et d’autre du haut-parleur regardant le sol, deux solides traverses en fonte d’aluminium sont fixées, assurant une assise ultra stable, ajustant la distance au sol finement par des petits plots en aluminium.

Ces barres sont terminées par de larges pointes métalliques réglables pour ajuster le niveau précisément.

Enfin, comme sur toutes les Neat, les composants de qualité haut de gamme sont soigneusement choisis pour leur intégrité musicale, câblés en l’air avec une connexion point à point. C’est un détail qui compte, parachevant une conception aboutie dans chaque détail.

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Timbres

Pas étonnant que les J6 aient obtenu la distinction de la meilleure écoute au salon North West Audio Show qui s’est tenu en juin dernier en Angleterre.

Pour bien les piloter, le puissant intégré Boulder 266 de 200 W a été associé ici avec succès, relié à des câbles Atlas Arran eux aussi particulièrement bien assortis.

Les Neat J6 sont des enceintes idéales pour les mélomanes, dans le sens où elles s’effacent en se fondant avec une homogénéité totale dans le discours musical, sans se mettre inutilement en avant par des artefacts qui sont bien éloignés de la réalité, comme une brillance excessive.

La beauté qui se dégage des Neat est celle de la prise de son et de la vraie couleur des orchestres, de la signature inimitable des grands instruments, où le timbre unique de chaque voix, notamment grâce au tweeter à la fois très fin et juste, s’intègre à merveille au médium vivant et sans coloration.

Dans le grave, même jusqu’aux plus basses fréquences, les J6 démontrent que la charge isobarique est capable d’apporter l’assise qui change tout, même dans ce format raisonnable, comme on peut le constater sur la BO du film Interstellar par Hans Zimmer, certainement inspirée par Philip Glass, vraiment impressionnante sur « Organ Variation » par la propreté et l’étendue du grave restitué par les J6.

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Dynamique

Le revers de la médaille sera de disposer de suffisamment de puissance et surtout de courant pour emmener les deux haut-parleurs 17 cm dans cette charge, comme le fait le Boulder 866 avec facilité, mais aussi un intégré plus abordable comme l’Atoll IN400 Evo de 160 W (sur 8 ohms), aussi récompensé lors du Show anglais.

Les J6 bien alimentées sont alors capables d’une vie et d’un contraste dynamique recréant les plus beaux clairs-obscurs de la musique, de façon parfois envoûtante car elles tiennent toujours le discours musical avec autorité, sans excès ni éclairage excessif.

Scène sonore

La présence magique de l’interprète face au micro se révèle sur les Neat, surtout quand c’est Jean-Louis Trintignant qui chante « Je voudrais pas crever » dans le splendide album de Daniel Mille L’Attente, accompagné d’une orchestration sobre mais prenante, où résonne avec justesse l’accordéon.

Beaucoup d’autres enceintes le font bien, mais sans doute pas avec autant de conviction et de vérité, car les Neat savent s’abolir et faire passer l’essentiel avant tout.

L’image sonore est parfaitement plausible, faisant oublier la présence physique des J6, pour mieux installer le piano d’Alexandre Tharaud, l’élégant violon de Renaud Capuçon et la voix caressante de Juliette Binoche sur Vienne de Barbara.

Écoutez « Nantes » avec Michel Portal à la clarinette basse et Roland Romanelli à l’accordéon pour voir !

Installées dans un salon de taille raisonnable, sachant disparaître dignement, elles ne vous feront pas oublier les meilleurs enregistrements.

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Rapport qualité / prix

Les Neat Acoustics sont fabriquées à la main par une équipe spécialisée basée à Teesdale dans le nord de l’Angleterre.

Elles respirent la qualité et le sens du détail peaufiné dans chaque aspect de l’enceinte, mais sans esbroufe inutile, pour un tarif à peine au-dessus de la barre des 10 000 euros.

Les finitions disponibles — blanc satiné, chêne noir, chêne naturel, noyer et macassar (option) — sont à la fois discrètes mais seyantes.

Il y a fort à parier que vous serez comblé par les Neat.

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Très proches mais plus menues et moins chères que les Neat XL6, les Momentum J6 sont une synthèse réussie du meilleur de Neat Acoustics.

Ces colonnes fines ne laissent pas deviner la qualité du grave dont elles sont capables, si l’amplificateur suit bien, grâce à la charge isobarique.

Comme le tweeter Elac AMT est une réussite et que le médium reste toujours le fameux R3 de Neat, le cocktail est hautement recommandable, sans se poser de questions sur les capacités des J6 à vous transporter dans les hautes sphères musicales.

Une heureuse découverte dans la gamme supérieure encore abordable.

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