Krypton sème un vent de références culturelles variées. Ces homonymes vous évoqueront peut-être l’élément chimique employé au sein des ampoules à incandescence, ou sinon éclaireront de vos lectures la planète fictive du premier superhéros SF des bandes dessinées… Or, Krypton remémore aussi la genèse de Davis Acoustics ! En effet, ce nom nous renvoie aux premières créations d’enceintes de Davis Acoustics, un peu avant 1990. À une époque où l’entreprise se consacrait quasiment uniquement à l’élaboration de haut-parleurs de haute technologie, selon l’expertise éminemment reconnue de M. Visan, le père. Entendez par là que les premiers modèles exploitaient déjà avantageusement les nombreuses innovations françaises dont il était lui-même l’instigateur, par l’usage de matériaux originaux, tels que le carbone ou le kevlar par exemple.
Fabrication et écoute
Les Krypton de cette époque lançaient ainsi les premières enceintes de conception maison, dotées des meilleurs composants, sous la forme d’une colonne 3 voies à 3 haut-parleurs.
La ligne Krypton d’aujourd’hui se décline pour l’instant en deux colonnes 3 voies – appelées n° 6 et n° 9 – et une bibliothèque 2 voies – dite n° 3. Par elles, Olivier Visan rend hommage à son père, incarnant à la fois, l’héritage technologique sublimé et le savoir-faire français dans la fabrication de transducteurs électroacoustiques. En somme, le retour des Krypton établit un rappel nostalgique de l’âge d’or de la hi-fi, et la clarification d’une légitimité technologique internationale.
BEAUTE SANS SURENCHERE DE LIGNE
L’adage historique de Davis, « une technologie de pointe au service de la musique », ne dit pas tout des gènes de l’entreprise. Car force est de constater que Davis Acoustics s’applique à soutenir la démocratisation du matériel audiophile.
Ce qui n’est pas une mince affaire vu notre contexte économique et la férocité de la concurrence internationale. Or les Krypton n° 9, les plus volumineuses des trois, se présentent sous le plus bel apparat, ne souffrant d’aucune approximation de finition. Elles arrivent à combiner la simplicité, l’élégance, tout en affirmant une personnalité visuelle propre. La façade avant en bois peinte, arbore quatre beaux haut-parleurs, que nous évoquerons plus loin.
L’enceinte en bois MDF, finement dessinée, est couverte par du vinyle imitation bois, d’un bel effet, vraiment, à tomber dans le panneau ! L’inclination de l’ensemble de quelques degrés par l’arrière établit une mise en phase verticale des haut-parleurs, grâce aux socles en forme de tremplin, susceptibles de recevoir des pointes de découplage, que nous recommandons fortement. Le bornier simple, de bonne facture, accepte tout type de connexion. Davis affectionne le bass-reflex que nous retrouvons ici avec un évent laminaire, débouchant par l’avant. De haut en bas, se déploient d’abord un tweeter en tissu de 28 mm, décliné du modèle de la gamme supérieure Courbet que nous avons par le passé appréciée. L’inspiration technique se retrouve notamment dans l’usage d’une chambre arrière de décompression, qui garantit la diminution drastique de la distorsion et d’un aimant en néodyme, par contre bien moins puissant que sur la version Courbet. En dessous, le kevlar est toujours à l’honneur, qui s’habille de noir ou se présente naturellement en jaune selon la finition de l’enceinte choisie, avec en son centre une ogive fixe usinée dans la masse.
À lui seul ce haut-parleur de 13 cm constitue une signature qualitative de bon aloi de 7e génération. Ce concentré d’expertise est soutenu dans le grave par un double 17 cm en papier rigidifié. Soit un dimensionnement et une légèreté de l’équipement mobile propre à satisfaire une reproduction des premières octaves de la bande passante, sans lourdeur et avec ampleur. Vérifions cela.
ECOUTE
Timbres : Le médium aigu lumineux de la retranscription rend l’écoute d’Eric Bibb joyeuse, d’autant que la voix rauque de l’interprète s’affirme avec acuité. La guitare acoustique conserve du coffre et le son incisif distinctif des pincements et claquements des cordes. Rien ne s’avère inintelligible, tout est clairement retranscrit, d’une manière enjouée, mais dans le respect de l’œuvre musicale. Du coup, le plaisir est sauf et s’établit en constante radieuse. À son écoute, on ne découpe plus les notes en quatre, à la faveur de l’enchaînement successif des disques, quels qu’ils soient. Si bien qu’on se prend au jeu, rapatriant certains vieux morceaux artistiques, souvent à contrecœur écartés, car pas toujours en veine au niveau de la qualité de l’enregistrement. Or avec les Krypton, comme par magie tout passe : Incognito, UFO, US 3 ou encore MC Solaar. En toute confidence, l’habituel suivi rythmique au jeu de pied a laissé échapper le spectacle déluré de quelques subtils déhanchements sur nos assises…
Dynamique : La bande passante est large, les soubassements vigoureux et rapides font hommage aux 17 cm qui s’animent en phases sans faiblir, avec le soutien d’une caisse qui participe au rendu final, par quelques toniques maîtrisées. Rien de véritablement gênant à l’oreille, au contraire, si bien que la contrebasse de Christian McBride exalte, en nous livrant une scène sonore crédible, légèrement physiologique, mais toujours agréable. Les Krypton n° 9 n’ont pas peur des watts, loin de là. Par contre, avec les enregistrements plus exigeants, il a fallu refréner leur excellente tenue en puissance pour que l’équilibre des registres se maintienne, tout en conservant un volume sonore très au-dessus d’un usage domestique. Du coup, tout va bien.
Scène sonore : Pareillement, le réglage du potentiomètre permet de sauvegarder l’équilibre des plans lorsqu’on écoute assez fort. L’image s’étend en largeur au bénéfice d’une belle stéréo, valorisant le travail des ingénieurs du son, dans les effets de style comme au niveau du placement des musiciens. Les Krypton n’ont aucun mal à fonctionner au sein d’une grande salle, malgré leurs empreintes au sol relativement réduites. L’équilibre de la scène s’établissant au niveau des enceintes et produisant au-devant d’elle une bulle sonore très immersive. Elles s’avèrent polyvalentes dans leur fonctionnement et définitivement éclectiques dans leur capacité constante à transcrire la musique.
Rapport qualité/prix : 2000 euros la paire! Après vérification de la grille tarifaire, il semblerait qu’il n’y ait pas d’erreur.
Alors pourquoi acheter ailleurs? C’est à cette question que vous devrez répondre, si tant est que vous recherchiez une colonne à ce budget. Le style réussi se livre à ce prix dans une finition sans faille, parée de haut-parleurs dernier cri pour le médium comme pour l’aigu : la prestation sonore validant le bonheur de pareil choix.
D’autant que si votre priorité est de faire tourner vos disques sans prise de tête, les Krypton n° 9 risqueront seulement de vous faire consommer plus de musique.
Verdict
Symboliquement, les lumineuses Krypton reviennent en n° 9 tel un superhéros sans cape, sans frime, un anti-élitiste sauvegardant la bourse et l’avis que l’on porterait à sa musique. Coiffées du béret technologique français, les Davis Acoustics ne peuvent se parer que d’un certain chic visuel. Au niveau des performances, elles se positionnent différemment par rapport à la ligne Courbet. Nous nous situons avec elles à un niveau d’exigence de la reproduction sonore moindre, forcément, mais où la rythmique et l’entrain seraient à l’oreille néanmoins conservés.
Autant dire que les Davis Acoustics Krypton n° 9 apporteront à ses acquéreurs un certain vent de fraîcheur dans le paysage de la hi-fi sérieuse premier prix.