PLATINE TD

THORENS TD2035

Evolution de la Thorens TD2030, la platine haut de gamme TD2035 et son esthétique on ne peut plus d’actualité s’inscrit en concurrente directe des modèles de jeunes constructeurs en vogue comme Clearaudio, par exemple. Le légendaire fabricant suisse maîtrise la platine vinyle sur le bout des doigts et ce nouveau modèle a tout pour entretenir le mythe.

1883. Année de la création de la marque Thorens dans le petit village de Sainte-Croix situé en Suisse dans le canton de Vaud. 2012. Année du lancement de la platine TD 2035, soit 129 ans plus tard. La longévité de l’entreprise que le propriétaire actuel Heinz Rohrer a redynamisée dans le début des années 2000 est, à n’en pas douter, la plus incroyable de l’histoire de la haute-fidélité. Entre les boîtes à musique des débuts et l’acrylique des platines les plus récentes, il y a eu quelques remarquables modèles dont l’emblématique et célèbre TD124 créée en 1958 ou l’époustouflante Thorens Reference de 1979 produite à 100 exemplaires. Le constructeur a toujours su répondre aux envies du marché et il le fait de belle manière avec la TD2035.

Technologie adaptée

Thorens est le plus ancien constructeur de platine vinyle de la planète. Il est logique qu’il ait connu et qu’il ait manipulé à peu près toutes les technologies propres à ce type de produit. La TD124 adoptait, par exemple, un système de transmission par galet à double étage avec une courroie intermédiaire qui permettait, entre autres, de filtrer les vibrations. Par ailleurs, le plateau (déjà) lourd était recouvert d’un second plateau léger et débrayable qui permettait la mise en rotation instantanée de la galette. Avec des modèles comme les TD125 ou TD150, il reprend l’idée du contre-plateau suspendu qu’il utilisera sur de nombreux modèles avec quelques variantes dont le « Swingchassis » avec la TD160 notamment. Le principe du contre-plateau suspendu est utilisé dans la gamme actuelle sur le modèle TD550, mais la production initiée depuis 2000 fait aussi la part belle à des modèles plus simples sans pour autant être simplistes. En effet, le constructeur lutte désormais contre la transmission des vibrations par l’utilisation de plateaux amortis lourds à très lourds, à l’exemple des 6 kg de celui qui équipe la TD2035. Par ailleurs, il fait toujours confiance à l’entraînement par courroie placée en extérieur sur les modèles de haut de gamme, avec un moteur déporté et sans contact mécanique fixe avec la platine. De la sorte, les éventuelles vibrations du moteur restent confinées.

Platine TD2035

Le modèle est installé sur une structure massive constituée d’un sandwich en acrylique de 33 mm d’épaisseur dessinant une courbe sur sa partie avant. La silhouette générale rappelle celle d’une platine allemande, l’Acoustic Signature Barzetti. En fait, le créateur de la marque Acoustic Signature, Gunther Frohnhoefer, a pendant un temps participé au design et à la fabrication des platines Thorens. La partie centrale transparente, la plus épaisse, est insérée entre deux couches teintées plus fines (disponibles en blanc, bleu, rouge, jaune orangé et noir) et légèrement mates. Outre l’esthétique très design, ce principe crée une référence mécanique extrêmement stable et rigide. Ce support repose sur trois pieds lourds et massifs en inox, chacun pourvu d’une pointe de découplage réglable en hauteur. Le nouveau moteur synchrone est installé sur six patins souples dans un logement effectué à l’arrière gauche au travers de l’acrylique avec lequel il n’a aucun contact. Il est muni d’une poulie à gorge en V qui entraîne une courroie de section carrée, qu’il faudra veiller à positionner sans torsade. Ce moteur est alimenté par un boîtier externe Thorens PS800 qui dispose de deux interrupteurs dont un pour la mise en rotation progressive du moteur afin de ne pas faire patiner la courroie, et un second pour le choix de la vitesse de rotation du plateau entre 33 (atteinte en sept secondes avec ce nouveau moteur) et 45 tours/minute. Le plateau, qui reçoit un couvre-plateau souple en matière antistatique, est en aluminium équilibré et amorti par le dessous avec une bonne épaisseur de compound dense. L’axe de rotation solidaire du plateau est installé dans un palier en bronze et repose sur du téflon.

Bras TP92

La platine TD2035 est proposée avec le bras Thorens TP92 qui est un modèle OEM (Original Equipment Manufacturer). Autrement dit, ce bras équipe les platines d’usine mais n’est pas proposé à la vente. Il a été mis au point en tenant compte des contraintes de prix du modèle TD309 mais, malgré cela, les ingénieurs ont réussi à concevoir un bras très performant de 9 pouces (précisément 232 mm de longueur totale). Sa structure droite réalisée en aluminium a été optimisée grâce une série de mesures vibratoires qui ont permis de maîtriser certaines résonances. En fait, ce bras apparu pour la première fois avec la TD309 a été conçu avec le groupe de design Fink Audio Consulting dont le patron est un gourou de l’enceinte acoustique. Selon les analyses que la firme a effectuées à propos du comportement aux résonances d’un tube dont on va se servir en tant que bras de lecture, on en déduit qu’il faut mettre la cellule quelque part le long du bras plutôt qu’à une extrémité, ce qui est impossible à réaliser d’un point de vue pratique. Au lieu de cela, une bague qui sert à amortir les résonances a été positionnée en un point très précis du bras, il ne faudra en aucun cas la déplacer. A une extrémité, il est installé dans le bloc pivot qui reçoit quatre roulements miniatures à billes du fabricant japonais MMB. Le modèle retenu est utilisé dans l’instrumentation de mesures et n’offre quasiment aucune résistance mécanique sur les mouvements très lents, qualité fondamentale pour une intégration dans un bras de lecture. Le contrepoids en laiton argenté est positionné derrière le pivot. Il est vissé sur un axe et découplé de celui-ci par une bague souple. Il est aligné en hauteur avec la surface du plateau pour abaisser le centre de gravité. L’antiskating est de type magnétique et sa force d’action est modulée par deux aimants qu’on rapproche ou qu’on éloigne au moyen d’une petite molette sur l’embase du pivot. En ce qui concerne le porte-cellule, il se résume à une petite pièce rectangulaire en aluminium avec le levier de manipulation du bras. Elle est maintenue par une vis Allen traversant un orifice oblong dans le bras qui autorise quelques millimètres de liberté dans le positionnement longitudinal de la cellule. Par ailleurs, une seconde vis située à l’arrière du bras et au sommet du bloc pivot étend un peu plus ce réglage et permet de peaufiner l’azimut. Deux autres vis maintiennent la cellule en place. Enfin, la TD2035 est dotée d’un système VTA (Vertical Tracking Adjustment) pour ajuster l’angle d’attaque vertical de la cellule à partir d’un bras parfaitement horizontal. Le signal issu de la cellule est envoyé vers le préampli phono par une paire de câbles blindés qui débouchent sous le socle du bras. Ils mesurent environ 60 cm et sont terminés par des RCA. Pour ceux qui souhaitent utiliser leurs propres câbles de modulation, la TD2035 peut être livrée en option avec une Cinch Box, petit boîtier fixé sous la platine et doté de deux fiches RCA femelles.

Ecoute

Nous avons reçu la Thorens équipée d’une cellule à bobine mobile japonaise et d’un préampli phono Thorens MC-005. Ce petit boîtier à alimentation déportée accepte les cellules MM comme MC et dispose d’un réglage d’impédance de charge par micro-switches placés sous l’appareil. Les étages de correction RIAA et de gain sont gérés par des amplificateurs opérationnels.Bien que la cellule n’ait pas été tout à fait à la hauteur des performances de la platine qu’il ne faudra pas hésiter à marier à des modèles de prix compris entre 500 et 1 000 euros, nous avons tout de même pu apprécier les qualités mélodiques de la suissesse qui s’impose dès le premier sillon. Il est impératif de la poser sur un socle stable et rigide afin de drainer toute vibration parasite au plus vite vers le sol. Du coup, la platine nous gratifie d’un message très structuré, très articulé, au sein duquel on se surprend à découvrir divers détails sonores qui n’avaient que très rarement été aussi bien mis en valeur. La justesse des timbres est excellente grâce à un rendu transparent du médium. La voix de Barbara sur « Ma plus belle histoire d’amour » (gravure universelle Philips) reste fluide et parfaitement intelligible lorsque le chant progresse en fréquence, tout comme le violon de Johanna Martzy interprétant le Concerto pour violon de Mendelssohn (édition audiophile testament) conserve un superbe grain. Le registre de grave est un des plus tendus que nous ayons entendu depuis une platine vinyle. La ligne de basse sur « I wanna boogie » par le United Blues Experience (édition audiophile Clearaudio) est distillée avec des attaques nettes et bien détourées. Tout juste constate-t-on un extrême grave un peu court et une dynamique un poil limitée, mais n’oublions pas que nous écoutons un ensemble platine, cellule et préampli phono et que notre banc d’essai rend compte du comportement global de ces trois éléments. L’aigu est très léger et ne donne jamais de signe de stress ou de brillance exagérée, il semble conforme à ce que nous connaissons de nos vinyles écoutés sur des sources analogiques de très haut niveau.

Verdict

La nouvelle Thorens TD2035 s’affirme comme une platine vinyle de haut niveau. La fabrication pas aussi simple que ne le laisse paraître la présentation très épurée met en œuvre des technologies éprouvées et efficaces. On est cependant loin du concept « usine à gaz » des platines d’antan et c’est dans l’intelligente simplicité de sa conception (à chaque problème, une solution la plus simple et la plus adaptée possible) que ce modèle tire son épingle musicale du jeu. Vivace, fougueuse, la Thorens TD2035 mérite vraiment des partenaires de même calibre pour délivrer le réel potentiel qu’elle détient.

Fiche technique

Origine : Suisse
Prix : 4 390 euros
(sans cellule, avec capot
de protection et pèse-cellule)
Dimensions : 420 x 160 x 330 mm
Poids : 15 kg
Type : entraînement par courroie
à régulation électronique,
moteur synchrone
Vitesse de rotation :
33,3 et 45 tours/min
Bras : Thorens TP92
d’origine, SME M2-9
ou 309 en option
Alimentation : Thorens PS800

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