AMPLI INTEGRE

HEGEL H300

L’intégré H300 du norvégien Hegel est le plus puissant intégré de son catalogue. Mieux, il intègre un convertisseur à haute définition doté d’une entrée USB, offrant ainsi la possibilité de se constituer un système minimaliste à partir d’un ordinateur et d’une paire d’enceintes de qualité. Bien fabriqué et puissant, il dispose de sérieux atouts pour séduire.

Le fabricant norvégien Hegel a profité de son expérience dans les domaines de la conversion numérique vers analogique, d’une part, et dans celui de l’amplification, d’autre part, pour concocter le H300 qui intègre un DAC avec entrée USB, délivre 430 W par canal et affiche un rapport performances sur prix très favorable.

Un cocktail technologique

Ce nouvel intégré a été conçu comme un tout. Son statut de plus ambitieux intégré du constructeur devait ouvrir d’autres voies que celles déjà offertes par l’excellent H200 en termes de puissance et de connectivité notamment. En ce qui concerne la puissance, le H300 délivre 250 W sous 8 ohms par canal, soit 50 de plus que le H200, avec un facteur d’amortissement aussi élevé que ce dernier. Il est donc clair que, sur le papier au moins, le H300 devrait pouvoir alimenter sans le moindre souci la plus récalcitrante des enceintes du marché. Le circuit global décliné de la série Reference reprend la technologie propriétaire SoundEngine de Hegel qui combine les avantages des classes A et AB sans leurs inconvénients. Plutôt que d’utiliser de la contre-réaction globale, le principe met en œuvre de la réaction « Feed Forward » locale (on mesure à un endroit et on apporte une correction en aval, à l’inverse de la contre-réaction qui corrige en amont) dont le taux est adapté automatiquement selon la distorsion à maîtriser. L’aspect audiophile des choses n’a pas été omis, car la technologie seule ne suffit pas à rendre une électronique musicale. Hegel a utilisé tout au long du schéma double mono des transistors à effet de champ (FET pour Field Effect Transistor), recette qu’il ne réserve qu’à sa gamme Reference. Ils sont sélectionnés manuellement, le tri aboutit en moyenne à un couple de transistors parfaitement appairés pour cent FET passés au banc de mesures. La section pré-amplification reprend des idées appliquées au préamplificateur haut de gamme P30. D’une part, le réglage de volume est effectué par commutation de résistances via l’indication de position de la roue codeuse actionnée par la molette en face avant. D’autre part, le principe propriétaire SoundEngine est également intégré au préampli. Côté conversion, il semblerait que le fabricant ait appliqué les recettes du HD20 sur le DAC intégré au H300. L’intégré dispose de cinq entrées numériques coaxiales et optiques dont une entrée USB acceptant des flux natifs en 24/96, et quatre autres entrées compatibles 24/192. Le secret de la restitution particulièrement définie du DAC du H300 réside dans la manière dont les données sont reçues et traitées. Hormis l’entrée USB gérée par le désormais traditionnel chip Tenor 7022, le reste du travail digital est confié à des puces AKM dont un rééchantillonneur asynchrone AK4127 et un convertisseur numérique vers analogique AK4399 travaillant sur 32 bits et acceptant les données PCM en 192 kHz et le format DSD.

Une alimentation de cheval

Signature esthétique du constructeur, le H300 entièrement noir livré avec une télécommande RC8 noire en aluminium est installé dans un châssis en tôle épaisse avec une face avant galbée en aluminium. On y trouve deux molettes pour la sélection des sources et le volume, un poussoir central de mise sous tension et un afficheur indiquant l’entrée en service et le niveau du volume variable entre 0 et 99 et clignotant en « mute ». La connectique inclut notamment une sortie variable pre out, une entrée home-cinéma à niveau constant pour raccordement à un processeur surround. Le DAC, doté de cinq entrées dont une USB, dispose également d’une sortie S/PDIF utilisable en DAC-Loop (activation par appui prolongé sur les touches DAC+ et IN+ de la télécommande). Cette option permet de travailler avec un DAC externe de très haut de gamme (comme le nouveau Hegel HD25 par exemple…) en le raccordant à cette sortie resynchronisée par le H300 puis en rebouchant la sortie XLR du DAC externe à l’entrée XLR du H300. Quatre robustes pieds cylindriques en aluminium supportent l’électronique. L’implantation interne dégage des airs de double mono. L’énorme transformateur torique central commun est encadré de huit condensateurs de filtrage de 10 000 µF et de toutes les cartes électroniques (10 au total). La connectique analogique et numérique est soudée sur les circuits imprimés, la sélection s’effectue par relais. Le signal audio transite ensuite séparément à gauche et à droite par une carte de pré-amplification puis une carte driver, avant d’attaquer les cinq paires complémentaires de transistors bipolaires adossés à un dissipateur massif. Une carte gère la protection par relais des sorties haut-parleurs.

Fabrication et écoute

Comme avec les autres intégrés, nous avons écouté le Hegel sur son entrée XLR symétrique afin de pouvoir juger de ses qualités d’écoute selon une méthode commune à tout le comparatif. Pour l’anecdote, nous avions pu écouter ce modèle, neuf de chez neuf, à l’automne dernier, et les résultats décevants n’avaient pu conduire à un banc d’essai objectif vu le manque évident de rodage de l’appareil. Aujourd’hui, nous le retrouvons avec plaisir après quelques centaines d’heures de fonctionnement. Un tout autre appareil désormais…

Construction : Le grand dépouillement esthétique et la grande simplicité du dessin du H300 en font une électronique visuellement discrète qui s’effacera dans la pièce où il sera installé. Les commandes disponibles en façade, dupliquées par la télécommande, la diversité des entrées et la présence d’un DAC de qualité acceptant plusieurs formats de signaux dont l’USB incitent réellement à s’intéresser au produit. La fabrication très sérieuse à l’extérieur (très beaux pieds massifs, efficaces dans l’évacuation des vibrations) comme à l’intérieur ne laisse aucun doute quant aux objectifs du constructeur : le meilleur au meilleur prix. La connectique somme toute standard reste de bonne qualité.

Composants : Hormis un transformateur imposant doté d’enroulements secondaires distincts pour chaque canal, la construction est double mono et la disposition mécanique avec des cartes et des composants est symétrique, gage d’une séparation optimale des canaux. Les étages numériques sont conçus autour de chips parmi les plus performants du moment. Le filtrage capacitif de l’alimentation donne une bonne idée de la réserve d’énergie du H300 donné pour 250 W sous 8 ohms par canal. Le câblage filaire interne minimaliste sépare au mieux chaque type de signal afin d’éviter toutes interférences mutuelles.

Grave : Le H300 dégage une excellente impression de force et de contrôle quand il explore le registre grave. Sur la piste « Moonlight on Spring River » par Zhao Cong (The Dali CD volume 3), la ligne d’extrême grave du synthétiseur se développe avec une articulation de très bon niveau et des contours nets sans effet de traînage de la part des enceintes biens tenues. Les soubassements manquent un peu de matière dans l’absolu, mais le poids ressenti reste crédible. Sur la piste « Julsang » (CD Cantate Domino), le jazz nous fait découvrir l’atmosphère dans laquelle baigne l’église, cette ambiance qui précède l’introduction du morceau à l’orgue et qui suit le silence total avant que la piste ne démarre.

Médium : Le H300 en surprendra plus d’un en ce qui concerne la richesse tonale qu’il distille dans le médium, notamment après une petite heure de fonctionnement. Autant l’écoute fut glaciale quand nous reçûmes l’appareil non rodé l’année dernière, autant elle nous a surpris très agréablement par la qualité des timbres, par la justesse du contenu harmonique (voix très sensuelle de Simone Kermes interprétant « Ha vinto amor ») et par la texture générale du message.

Aigu : Les sensations furent les mêmes dans les hautes fréquences que dans le médium. L’utilisation de la technologie Sound Engine du constructeur associée aux caractéristiques sonores des transistors Fet parfaitement appairés en entrée est probablement une des origines du ciselé et du fouillé proposés par le H300 dans l’aigu. La pipa de Zhao Cong aux sonorités complexes n’est jamais monotonique ou brillante, au contraire les notes reproduites conservent une texture très fine où le dégradé des harmoniques supérieurs finit de modeler la structure, le filé et l’extinction.

Dynamique : La taille du transformateur et la réserve capacitive nous faisaient pressentir un comportement énergique du H300 en termes de dynamique. En effet, l’intégré norvégien fait preuve d’un bel enthousiasme sur les demandes transitoires violentes qui sont reproduites avec une bonne amplitude virtuelle. Aucune impression de tassement même quand on écoute à fort niveau, ce qui tend à prouver que l’alimentation a du répondant. Les faibles signaux musicaux sont également explorés avec la même aisance modulatoire de la part du H300 dont l’expressivité ne devrait a priori pas se ternir avec des enceintes à bas rendement.

Attaque de note : C’est une des clés de la musicalité du Hegel. La vivacité dont il nous gratifie est à l’origine des qualités tonales parfaitement identifiées dans le médium et dans l’aigu. Qui dit rapidité implique contenu harmonique dense et correctement décliné dans le temps, et il est vrai que l’écoute du Hegel transmet une impression de son juste en timbres et en couleurs, de son défini. La lecture des messages complexes demeure extrêmement lisible même à niveau d’écoute élevé.

Scène sonore : Grâce à son haut niveau de définition, le H300 est capable de restituer l’atmosphère d’une salle de concert, d’un studio ou d’un public en extérieur avec beaucoup de crédibilité, car on perçoit pléthore de détails d’ambiance qui dressent la scène sonore. Les proportions sont respectées et rappellent celles de notre système repère ; néanmoins, le volume subjectif dégagé, l’ampleur ressentie marquent un peu le pas, toujours par rapport à notre système, plus ambitieux il est vrai. Cela n’empêche nullement le H300 de rester holographiquement excellent et de pouvoir rivaliser sans problème sur ce critère avec des ensembles séparés plus coûteux.

Transparence : Comme nous l’indiquions en préambule, le H300 neuf et le H300 rodé procurent des résultats sonores radicalement différents. Il faut bien avouer que le sérieux rodage effectué par Accentuel, l’importateur français de la marque, a littéralement transfiguré la restitution de l’électronique norvégienne. Et notamment en termes de transparence et de neutralité tonale. Le Hegel est un maillon neutre et d’une finesse d’analyse distinguée que la puissance dont est capable de fournir l’appareil ne déstabilise pas. L’écoute reste cohérente en toutes circonstances.

Rapport qualité/prix : Les spécifications techniques sont éloquentes avec beaucoup de puissance disponible, un nombre d’entrées répondant aux besoins réels du mélomane et surtout un DAC intégré de série et doté de cinq entrées dont une USB 24/96. Dans ce créneau de prix autour de 4 500 euros, le H300 caracole dans le peloton de tête des amplificateurs intégrés qui proposent non seulement des performances mesurables de haut de gamme mais également et surtout une musicalité évidente.

Verdict

Le H300 ne s’exprimera qu’une fois sérieusement rodé, cette opération impérative transforme radicalement la personnalité de l’appareil dont la restitution devient particulièrement bien timbrée dans le médium et d’un filé inattendu dans l’aigu si tant est qu’on lui associe des enceintes douces mais alertes dans ce registre. Le grave bien charpenté et bien tendu apporte de la matière à la restitution quel que soit le volume d’écoute, et on obtiendra le soupçon d’extrême grave supplémentaire avec des enceintes qui explorent naturellement bas le registre. Le H300 est le choix du rapport qualité sur prix optimal et raisonné.

Fiche technique

Origine : Norvège
Prix : 4 550 euros
Dimensions :
430 x 120 x 380 mm
Poids : 22 kg
Puissance nominale :
2 x 250 W sous 8 ohms,
2 x 430 W sous 4 ohms
Bande passante : 5 Hz - 180 kHz
Distorsion : < 0,01 %
(100 W 8 ohms 1 kHz)
Facteur d’amortissement : > 1 000
Entrées : 3 RCA (ligne), 1 XLR (ligne),
1 RCA (home-cinéma), 2 S/PDIF
sur RCA (24/192),
2 Toslink (24/192), 1 USB (24/96)
Sorties : 2 paires de fiches HP,
1 RCA (pre out), 1 S/PDIF sur RCA

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