ENCEINTE

ROCKPORT
TECHNOLOGIES ATRIA

L’Atria est la dernière création de l’américain Rockport Technologies. Déclinaison du modèle Avior et nouvelle entrée de gamme du fabricant à la place de la Chara qui disparaît du catalogue, elle conserve l’intégralité des technologies mises en œuvre sur son aînée et la somptueuse fabrication maison.

Créée en 1984 par Andy Payor, la société Rockport Technologies s’est d’abord fait connaître grâce à sa platine vinyle Sirius Phonograph avant de développer d’autres platines puis des enceintes acoustiques. Question de transduction sonore, mon cher Watson ! En effet, les deux étapes où les pertes de qualité sont les plus importantes sont celles où le signal audio subit une transformation fondamentale, mécanique en électrique pour la platine et sa cellule, électrique en acoustique pour l’enceinte et ses haut-parleurs, deux domaines dans lesquels le constructeur s’est rapidement forgé une réputation. Désormais ancrée dans la conception et la fabrication d’enceintes acoustiques, Rockport Technologies est un des leaders actuels incontestés sur le marché du très haut de gamme. L’Atria, colonne trois voies objet de ce banc d’essai, est venue récemment s’installer au pied d’un catalogue jusqu’alors composé de quatre modèles plus ambitieux.

Haut de gamme en entrée
L’Atria est la nouvelle entrée de gamme chez Rockport Technologies. Il faut plutôt la considérer comme une enceinte de très haut niveau, une véritable Rockport dont les performances sont un peu plus limitées que celles des autres modèles du constructeur. Car en réalité l’Atria est une petite Avior, une version allégée d’un haut-parleur de grave et donc de quasiment la moitié du volume dédié au registre, de quelques kilos et in fine moins encombrante. Mais l’essentiel reste avec l’hallucinante qualité de fabrication, les technologies et la musicalité. Les parois de l’ébénisterie réalisées à partir de trois couches laminées précontraintes et amorties adoptent des lignes galbées en externe comme en interne. Outre l’esthétique visuelle agréable, l’irrégularité géométrique ainsi créée en interne bannit tout parallélisme, ce qui augmente la rigidité de l’Atria et diminue sensiblement l’apparition d’ondes stationnaires. L’épaisseur du baffle support est de 10 cm et celles des parois varient avec un maximum de 65 mm. De plus, les phénomènes de diffraction d’ondes sont fortement atténués grâce au profil aérodynamique et à la section changeante de l’enceinte vue de dessus. La finition en laque piano noire est superbe. Le socle très épais reçoit quatre robustes cônes de découplage dotés d’une molette d’ajustement en hauteur. Le haut-parleur de grave de 23 cm comme celui de médium de 15 cm sont identiques à ceux de l’Avior, ils ont été entièrement créés et développés par Rockport. Montée sur un saladier en aluminium à branches très fines, pourvue d’une suspension en demi-rouleau caoutchouc très souple et mue par un énorme aimant ferrite, leur membrane en forme de dôme concave est réalisée en sandwich à base de fibres de carbone. Le rapport rigidité sur poids est extrêmement élevé, ce qui garantit un fonctionnement en piston dans leur bande respective de fréquences. Le boomer est chargé en bass-reflex avec un évent cylindrique d’accord usiné dans un bloc d’aluminium massif et rapporté à l’arrière de l’enceinte. L’aigu est confié à un tweeter Scan Speak à dôme de 25 mm en béryllium pur. Le filtrage est du quatrième ordre acoustique (combinaison de la coupure naturelle haut-parleur et baffle, d’une part, et de la coupure du filtrage électrique de type elliptique, d’autre part) afin d’éviter toute intermodulation gênante au recoupement entre deux haut-parleurs. Les composants utilisés à très faible tolérance incluent des condensateurs à film et des inductances conçus sur cahier des charges Rockport Technologies ainsi que des résistances de puissance Caddock. Le câblage interne Transparent Cable débouche sur une paire de bornes en métal massif d’origine Cardas mais spécifiques au fabricant.

Fabrication et écoute

Composants : On n’est jamais mieux servi que par soi-même, et Rockport Technologies l’a parfaitement compris en créant (le terme de création n’est pas usurpé avec ce fabricant) non seulement ses ébénisteries mais en développant
ses propres haut-parleurs. Néanmoins, il ne suffit pas d’aligner les meilleurs composants du monde pour penser obtenir le meilleur produit, encore faut-il les assembler avec maîtrise et cohérence. Et c’est là que le savoir-faire du constructeur entre en jeu avec un choix extrêmement raisonné des technologies (matériaux de la caisse et des membranes, filtrage, etc.) et une mise au point systématiquement asservie à des tests d’écoute.

Grave : La faible impédance et le rendement moyen des Atria nécessiteront un amplificateur puissant et très structuré dans le bas du spectre. On se rend d’ailleurs vite compte que l’enceinte encaisse les watts avec une facilité assez déconcertante sans montrer le moindre signe de cafouillage ou de perte de lisibilité, donc il ne faudra pas transiger sur ce point. Du watt et du bon ! Dès cet instant, l’américaine délivrera un registre de grave très étendu et bien articulé. La première octave reste courte, mais on la ressent néanmoins (ligne de basse synthétique du « Moonlight on Spring River » par Zhao Cong), les frappes de timbales sont très convaincantes et le sont d’autant plus que le diamètre de l’unique boomer n’est pas démesuré. Le haut grave, d’une clarté saisissante, lève le voile sur des informations habituellement en retrait ou voilées. Il souffle un vent de fraîcheur dans les soubassements.

Médium : On approche de ce qu’il est possible d’entendre de mieux actuellement sur ce critère. Curieusement, et paradoxalement serions-nous tentés d’ajouter, cette performance est obtenue à partir d’un haut-parleur à membrane en fibres de carbone, matériau qui, hormis des propriétés mécaniques de premier ordre, n’est pas spécialement réputé pour sa musicalité enjouée. Il faut croire que Rockport Technologies a sérieusement travaillé le sujet, car les Atria nous ont vraiment séduits par leur palette tonale et leur nuancier harmonique particulièrement diversifiés, d’une part, et par leur absence totale de distorsion subjective, d’autre part. Les timbres sont superbes, à l’image de la grande variété de tonalités et de la sensualité à fleur de peau de la voix de la soprano Simone Kermes interprétant « Ha Vinto Amor ».

Aigu : Le constructeur a fait confiance à son fournisseur de tweeters de prédilection et a reconduit la technologie du dôme en béryllium pour la reproduction de l’aigu. Il faut reconnaître qu’il est très rare qu’un dôme plus traditionnel (tissu, céramique, métal) déploie l’énergie et le fouillé harmonique restitués par le dôme des Atria. Les percussions sur « Moonlight on Spring River » par Zhao Cong ou les cuivres de batterie sur « Animal » par Francis Cabrel sonnent avec beaucoup de pleins et de déliés, la partition module vivement et procure une vivacité peu commune au message. Pour les puristes, l’extrême aigu pourra parfois paraître un peu appuyé, plus vrai que nature, néanmoins il confère un supplément de présence assez appréciable à la performance.

Dynamique : Nous évoquions plus haut le fait que l’Atria encaisse la puissance avec beaucoup de facilité et sans accuser de faiblesse particulière, ce qui la prédestine à être drivée par une électronique puissante de haute qualité. Nous avons pu les écouter sur notre bloc stéréo repère et sur les nouveaux blocs Pass Labs Point 8 en appréciant dans chaque configuration les spécificités sonores des enceintes et des amplificateurs, signe de la grande transparence des Atria. La légèreté et la rigidité des membranes favorisent la réactivité et l’absence de distorsion audible sur les appels transitoires, l’auditeur ressent aisément l’énergie restituée par les enceintes. Sur la piste « Animal » interprétée par Francis Cabrel, les différentes percussions sont parfaitement appréhendées en termes de personnalité (taille, matériau, force de la frappe) et de localisation dans l’espace du studio.

Attaque de note : Le choix de transducteurs rapides montés dans une caisse ultra-rigide et donc exempte de toute forme de colorations générées par vibrations de parois accroît la fidélité du son restitué par les Atria par rapport au signal original qu’elles traitent. L’indéniable « propreté » sonore de ces colonnes indique que le dégradé harmonique qu’elles proposent se rapproche du dégradé réel. Les attaques respirent l’immédiateté, la spontanéité, et il n’est pas besoin d’envoyer beaucoup de puissance aux enceintes pour en apprécier leur faculté à suivre le rythme et l’écriture de chaque partition. Par rapport à nos enceintes repères, l’agilité du tweeter en béryllium prolonge et éclaircit les extinctions de notes. Et malgré la sensibilité plutôt faible de ces Rockport, l’écoute ne s’assombrit pas à très bas volume sonore ; au contraire, elle reste pleine, fluide et réaliste.

Scène sonore : La position des enceintes par rapport au point d’écoute n’est pas critique, nous avons pour notre part retenu une légère orientation vers le point d’écoute avec un croisement des axes de diffusion juste en arrière. La scène remplit l’espace devant l’auditeur avec une propagation totalement crédible dans les trois plans géométriques ; on apprécie notamment l’étagement des plans très structuré en profondeur spécifique à chaque performance et à chaque enregistrement. La focalisation des sources sonores est précise avec un détourage net des protagonistes. L’analyse particulièrement détaillée du tweeter confère beaucoup d’aération à la restitution.

Transparence : Terme souvent galvaudé, la transparence d’un produit audio en général et d’une enceinte acoustique en particulier ne définit ni plus ni moins que son degré de fidélité, son aptitude à traiter le signal sans le déformer de quelque manière que ce soit. En ce qui concerne les Atria, nos pistes repères et nos tests pièges n’ont pu les mettre en défaut. Aucune remarque négative sérieuse n’a donc pu être émise quel qu’ait été le critère d’évaluation subjective abordé. Bande passante étendue, équilibre d’une extrême linéarité, dynamique, vivacité et neutralité, les atouts de séduction dont dispose l’Atria sont vraiment nombreux et évidents.

Verdict
Les colonnes Rockport Technologies Atria figurent parmi les plus musicales enceintes acoustiques qu’il nous ait été donné d’écouter et de tester, et ce toutes catégories de prix confondues. La restitution de qualité ultime prolonge à merveille une esthétique raffinée agrémentée d’une fabrication et d’une finition à tomber. Elle délivrera son immense plénitude sonore avec une amplification puissante et rigoureuse. Du grand art acoustique.

fiche technique
Origine : Etats-Unis
Prix : 23 500 euros
Dimensions : 1 105 x 317 (socle) x 508 mm (socle)
Poids : 68 kg
Réponse en fréquence : 28 Hz – 30 kHz
Impédance nominale : 4 ohms
Sensibilité : 87,5 dB/2,83 V/m
Puissance minimale recommandée : 50 W

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