ENCEINTE
La firme Paradigm commémore trente ans de succès au travers de cette enceinte colonne Tribute, éditée en quantité relativement limitée. Elle rassemble tout le savoir-faire du constructeur canadien.
Paradigm mesure le chemin parcouru depuis trente ans, des débuts modestes de Jerry VanderMarel et Scott Bagby à l’expansion de la marque, à présent distribuée sur les six continents, dans pas moins de 55 pays. Actuellement, l’équipement de la firme de Toronto comprend une chambre anéchoïque (chambre sourde) de plus de 10 000 m3 ainsi que deux salles pour effectuer des écoutes en double aveugle, et un système de mesure très avancé créé par ses ingénieurs. Paradigm a, depuis 1990, reçu près de 200 prix pour la qualité de ses enceintes acoustiques.
Une colonne élégante
Si la Paradigm Tribute est haute (plus de 1,10 m de haut), elle ne prend pas beaucoup de place au sol. Les dimensions du baffle, calculées au plus juste, contribuent à l’élimination des effets de bord. Le coffret à la finition exemplaire repose sur un socle à quatre pieds ajustables. Petite touche esthétique originale, le constructeur a revêtu l’enceinte d’un vernis grenat foncé de toute beauté. Le baffle accueille trois boomers, un médium et un tweeter. Les haut-parleurs de graves voient leur réponse renforcée dans le bas du spectre au moyen d’un évent bass-reflex situé en façade, ce qui facilitera le placement des Paradigm par rapport au mur arrière. Cela ne signifie pas pour autant qu’il ne faudra pas les en éloigner !
Des boomers composites
Les trois boomers de 7 pouces (178 mm) fonctionnent ensemble. Leurs membranes en polypropylène injecté voient leur rigidité augmenter par l’ajout de 30 % de carbone dans leur composition. La suspension périphérique a été surmoulée et collée sur le cône. Elle présente une bonne souplesse et contribue au maintien du centrage de la membrane. Cet élément breveté, réalisé en Santoprène (un thermoplastique vulcanisé), présente des corrugations afin d’optimiser les mouvements en piston de la membrane. Comme sur les autres transducteurs de la marque, Paradigm a intégré son système de refroidissement à air forcé AVS (Airflow Ventilation System) au saladier en fonte d’aluminium. À l’intérieur prend place l’équipage mobile à longue excursion, guidée par un spider en Nomex. La bobine baigne dans un champ magnétique élevé produit par un tore céramique surdimensionné. On peut donc s’attendre à une excellente restitution dans le registre grave, au vu des moyens techniques engagés. Les trois boomers laissent la main vers 200 Hz, grâce à un filtre passe-bas du troisième ordre, soit 18 dB par octave. Le filtre de la Tribute 30th Anniversary rassemble des composants de haute qualité, comme des selfs sur air, des résistances céramique de haute précision et des condensateurs au polypropylène, reconnus pour leur très faible distorsion et leur respect des transitoires.
Un médium remarquable
Ce transducteur travaille dans la bande de 200 Hz à 2,2 kHz, fréquence assurant la transition avec le tweeter, toujours via un filtre à la pente de 18 dB par octave. À l’instar du trio de boomers, le médium présente le même diamètre de membrane, soit 178 mm, montée dans un saladier doté du système AVS, et un aimant ferrite surdimensionné, mais les comparaisons s’arrêtent là. En effet, cette fois, le constructeur a réalisé la membrane en aluminium anodisé, ce qui lui confère une excellente rigidité, et une suspension en Butyl. Le cache-noyau prend la forme d’une ogive en aluminium injecté, dont le rôle consiste à améliorer la réponse en phase et élargir la dispersion. Ce haut-parleur ne subit pas les variations de pression en interne provoquées par les boomers, puisqu’un volume acoustique spécifique l’en protège. Cet élément en fonte d’aluminium présente une forme asymétrique afin de casser les ondes arrière de la membrane. Ces ondes sont amorties par un revêtement qui les transforme en chaleur.
Du Béryllium !
Le tweeter reprend une technique héritée des Paradigm Signature Series : un dôme de 2,54 cm de diamètre, réalisé en béryllium, un métal rare réputé pour sa grande légèreté et sa rigidité extrême, utilisé dans le haut de gamme par plusieurs constructeurs. Ces paramètres montrent tout leur intérêt dès qu’il s’agit d’obtenir une réponse impulsionnelle optimale sans distorsion audible, grâce à un rapprochement du fonctionnement théorique en piston de la membrane. Cette dernière, protégée d’une fine grille acoustiquement transparente, se loge dans une ébauche de pavillon afin d’élargir sa diffusion. Les striures de sa périphérie évitent tout effet de bord. Le moteur du tweeter adopte, cette fois, un aimant au néodyme, alliant compacité et champ magnétique élevé, et surtout orienté et homogène, ce qui contribue de manière significative à la réduction de la distorsion, aidé en cela par du fer doux qui concentre le champ magnétique sur la membrane. Du ferrofluide se charge de linéariser et de refroidir le tweeter. Une chambre acoustique arrière optimise la réponse impulsionnelle du tweeter et apporte, elle aussi, sa quote-part à la réduction de distorsion et au respect de la dynamique.
Fabrication et écoute
Construction : Le profil très étudié de la caisse joint à l’élégance esthétique concourrent à la suppression des ondes stationnaires gênantes pouvant affecter le fonctionnement des boomers. Le baffle étroit présente des dimensions tout juste supérieures aux saladiers des boomers et du médium afin de réduire les effets de bords. La finition irréprochable des ébénisteries s’explique par la présence d’un vernis de couleur grenat, poli à la main.
Composants : Outre les filtres composés de selfs sur air, de résistances céramique et de condensateurs au polypropylène, la nature des membranes des haut-parleurs diffère selon leur bande de fréquence à restituer : polypropylène dopé au carbone pour les boomers, aluminium pour le médium et béryllium pour le tweeter.
Grave : Les Paradigm font preuve de chaleur et de générosité dans le registre grave, ce qui leur donne parfois une réponse un peu physiologique. Sur le stick Chapman joué par Pascal Gutman sur son album Cascade, les notes les plus graves ont tendance à perdre leur sonorité tendue. Même le kick de batterie de Phil Collins frappant la grosse caisse sur le fabuleux album Grace & Danger de John Martyn semble mis en avant. On peut facilement remédier à ce côté un peu trop généreux en glissant un petit pain de mousse dans le large évent bass-reflex.
Médium : Cette bande de fréquences s’étendant sur environ 3 octaves et demie jouit d’une musicalité largement au-dessus de la moyenne, grâce à un excellent transducteur à membrane en aluminium. Responsif, il réagit aux sollicitations du programme musical, avec subtilité, finesse et haute définition. Ce constat évident se vérifie dans la présence des voix et la richesse des instruments de musique au riche contenu harmonique.
Aigu : Le tweeter en béryllium semble indestructible, toujours prompt à réagir aux moindres sons transitoires, même les plus brutaux. Il fait merveille sur les bandes-son de films, grâce à sa dynamique et sa haute précision. Sur les audiogrammes de musique classique, il pourra déboucher les ombres de prises de son un peu ternes ou réalisées dans des salles trop amorties.
Dynamique : Le caractère vivant de ces colonnes prédomine, quel que soit l’audiogramme joué. Leur sensibilité de 93 dB pour un watt à un mètre (en champ réverbérant) les aide beaucoup en ce sens, si bien qu’il n’est pas nécessaire de jouer du volume pour apprécier la musique et les écarts de niveaux de l’œuvre d’Alfred Schnittke, interprétée par l’Orchestre symphonique de Russie.
Attaque de note : Allant de pair avec la dynamique, les sons transitoires doivent leur rapidité de restitution à des membranes légères (et rigides), ce qui confirme le caractère vivant des Paradigm Tribute. Dans le haut du spectre, l’association de bienfaiteurs (médium et tweeter) fait merveille sur les cordes pincées, qu’elles soient en nylon ou en acier, des guitares acoustiques. On retrouve, en toute logique, la même fidélité des attaques sur les percussions et les cordes frappées.
Scène sonore : Le couple formé par le médium et le tweeter garantit une scène sonore cohérente, dupliquant sans difficulté les nuances présentes sur les audiogrammes, notamment en matière d’acoustique naturelle. De plus, la vivacité du médium aigu aide à la focalisation des sources dans les trois dimensions, sans amortissement de la profondeur qui, le cas échéant, serait passé pour une faiblesse.
Transparence : Conséquence directe de ce qui précède, les Tribute 30th Anniversary respectent l’intégrité des timbres au-delà de 200 Hz. En chipotant un peu, on pourrait ajouter que le tweeter gagnerait à se calmer un peu dans le haut du spectre qu’il restitue tout de même avec grande précision, mais, s’il donnait l’impression de filer juste un peu moins haut, il ne fâcherait personne, au contraire !
Qualité/prix : L’investissement conséquent que nécessitent ces enceintes repose sur deux points : d’une part, la débauche de technologie dans la conception des transducteurs et autres éléments (filtres, coffret) entrant dans la construction des Tribute. D’autre part, il s’agit d’une édition limitée, créée pour célébrer le trentième anniversaire de la firme canadienne, sachant qu’une petite série présente un prix de revient plus élevé qu’une fabrication à grande échelle.
Verdict
Vivantes et dynamiques, ces Tribute 30e Anniversaire sauront réveiller une chaîne anémique caractérisée par un amplificateur trop mou. Les technologies employées dans la conception des transducteurs donnent, dans l’ensemble, de bons résultats. Afin de compenser la propension à restituer le registre grave de manière physiologique, l’insertion d’un peu de mousse, afin d’amortir l’évent bass-reflex, rétablira l’équilibre.
Fiche technique
Origine : Canada
Prix : 6490 euros la paire
Dimensions (avec supports
et cache) : 113,2 x 31,6 x 40,5 cm
Poids : 41,8 kg
Réponse en fréquence :
43 Hz à 45 kHz ± 2 dB
Sensibilité : 93 dB/1 W/1 m
Puissance admissible :
de 15 à 350 watts sous 4 ohms
Impédance nominale : 8 ohms