

Phasemation est très renommé pour ses cellules MC et ses étages phono, parmi les meilleurs existants, comme les EA-1200 et EA-2000 exceptionnels. Mais la marque japonaise possède dans son catalogue 4 amplificateurs à tubes, dont ce nouvel intégré stéréo 300B, la reine des triodes, qui plus est en SE, pour un enchantement des sens.
À commencer par la vue, dont la parure champagne somptueuse est à l’image de la finition irréprochable, point commun de tous les Phasemation. Un écran en verre épais protège des contacts brûlants, et le capot percé d’un élégant motif géométrique cache les transformateurs. Signe des temps et révolution culturelle : ceux-ci ne sont pas japonais mais d’origine suédoise Lundahl, choisis après de stricts comparatifs de mesure et d’écoute face à d’autres modèles.
Autre détail des hautes prétentions de cet intégré 300B : chaque composant a été méticuleusement choisi et agencé selon ses performances et ses qualités musicales, pour un résultat enthousiasmant.
Il se dégage une classe certaine du Phasemation SA-1500, laissant pressentir que la marque n’a pas fait les choses à moitié pour tirer toute la quintessence de ce tube légendaire, toujours présent après 86 ans d’existence, qui fut créé en 1938 par Western Electric pour le cinéma parlant.
Comme il se doit, c’est une triode contenant trois éléments : le filament, la grille de commande et la plaque. Elle est utilisée ici en simple étage (SE, single-ended) en pure classe A, amplifiant donc la totalité du signal pour un canal.
Ce circuit nécessite les meilleurs composants (très peu nombreux), ainsi qu’une alimentation silencieuse, car elle est aussi modulée lors de l’amplification du signal. De plus, il n’y a pas d’annulation du bruit en sortie dans le transformateur, contrairement à un push-pull traitant les polarités séparément.
Pièce maîtresse, le transformateur de sortie doit posséder une bande passante étendue, une faible distorsion en minimisant les non-linéarités, pas de rotation de phase, mais surtout une réponse dans le grave non écourtée, alors qu’il doit impérativement disposer d’un entrefer pour éviter sa magnétisation par le courant continu, ce qui empêche de fortes valeurs pour l’inductance primaire.
Le Lundahl LL1663/80 mA répond à ce cahier des charges exigeant fixé par Phasemation, y compris et surtout musicalement.

Admirez le tube 300B, ici un magnifique Takatsuki japonais : cette merveille de triode en fait toujours rêver beaucoup.
Sur la belle façade champagne se trouve le sélecteur d’entrées Ligne, au nombre de trois sur prises RCA, dont la 1 peut se convertir en mode Direct, pour une utilisation en tant qu’amplificateur de puissance.
À droite se place le volume onctueux, mais sans télécommande, choix très puriste bien que plus qualitatif qu’un volume motorisé. Cela peut être contourné par le mode Direct en cas de source numérique avec volume.
Le circuit à trois étages sans aucune contre-réaction globale utilise la double triode d’entrée 6SN7, configurée en 2 étages reliés par une capacité film alu de 0,1 µF, attaquant le 300B par l’intermédiaire d’un condensateur de 0,5 µF à armature cuivre, avec un courant plaque de 80 mA.
La triode est en polarisation automatique par la cathode : une résistance blindée non inductive est découplée par un condensateur de 100 µF / 160 V, mis en parallèle avec une capa film de 0,056 µF / 630 V.
Contribuant également au résultat final, l’alimentation à faible bruit en Pi est sérieusement élaborée. Elle comprend deux selfs, une par canal, qui éliminent les interférences mutuelles, précédées d’un pont de diodes à commutation rapide du fabricant japonais ROHM.
Le transformateur surdimensionné pour l’alimentation haute tension et le chauffage filament séparé des 300B, qui se fait en courant continu pour éliminer le bruit, est isolé du châssis par un joint caoutchouc, supprimant la transmission des vibrations indésirables aux tubes.
Mais 2 × 9 W seulement peuvent-ils suffire ?
Il faut que l’enceinte soit bien adaptée à un SE pour qu’il s’exprime pleinement, c’est-à-dire d’un rendement d’au moins 90 dB, et facile à piloter par un filtrage non torturé en impédance. Une Stenheim Two ou Three conviennent bien dans un salon domestique, ou tout autre modèle sensible.
Mais ceci est la théorie, car le SA-1500 s’est comporté de façon surprenante sur certaines enceintes à rendement modéré, avec quelques limitations mais très musical.
Ce 300B casse la réputation des SE beaux en timbres mais mous dans le grave et colorés dans le bas-médium, car s’il est d’un raffinement unique propre à la triode en simple étage, il est aussi d’un dynamisme très vivant, sans coloration typée.
Il conserve l’avantage incomparable de la 300B dans la légèreté des nuances, la véracité et l’étendue de la palette de couleurs sonores, comme sur le piano de Pollini jouant Chopin enregistré en 1974 (DGG), magnifique artistiquement par la classe naturelle du piano, dont une main gauche bien modulée.
Tout le soyeux s’offre à vous dans l’aigu, léger et varié, et dans le médium, les voix sont d’un incomparable naturel sur un 300B : sensuelles, incarnées et bien en volume, comme la sublime Helen Merrill accompagnée de Gill Evans sur « Summertime ».
Certains SE de 300B montrent des limitations dans leurs capacités dynamiques, pour différentes raisons, comme l’incapacité du driver à moduler à fond la grille du 300B, ou l’alimentation insuffisante, provoquant un écrêtage et un tassement.
Cela se traduit par une certaine mollesse générale, mais ce n’est absolument pas le cas du Phasemation qui surmonte brillamment cet écueil.
Lui dispose au contraire d’une énergie permanente, conjuguée à une absence de sonorités typées qui mettent en avant un caractère enjoué et naturel, aussi très transparent, par la faculté du 300B à exprimer toute la complexité de la musique, sa structure intime et son articulation, plus que tout autre tube.
L’analogie d’un océan de dynamique comme des vagues qui arrivent au gré de la modulation est pertinente, à condition que l’enceinte suive.
Mais rappelons-nous que dans une grande majorité des cas, à volume raisonnable, la puissance ne dépasse pas 1 W en continu, ce qui laisse un peu de marge sur les crêtes.

Tous les aficionados du 300B apprécient sa faculté à présenter une scène sonore spacieuse, où l’air circule autour des musiciens, précise dans toutes les dimensions, et même très loin en profondeur, au contraire de la chape de plomb souvent de mise sur certains transistors ou tubes push-pull imprécis, ou trop euphoriques pour être vrais.
Rien ne vient ralentir le signal à l’intérieur d’un seul tube à vide modulé en pure classe A, dans son intégralité, sans rien d’autre dans la chaîne d’amplification, si ce n’est la qualité du transformateur de sortie.
Sur un duo guitare/voix, comme la chanteuse Gillian Welch sur l’album The Harrow & The Harvest, la présence est incomparable, où chaque syllabe et mouvement de tête devant le micro sont clairement perceptibles.
Sur un excellent enregistrement comme le dernier album de Jerome Sabbagh Heart avec Joe Martin et Al Foster, la présence quasi holographique du saxophoniste impressionne et la texture de l’instrument émerveille.
Il faut dire que nous n’avons pas pu résister à installer des Takatsuki japonais, parmi les 2 ou 3 meilleurs 300B actuels, qui subliment l’irrésistible séduction de ce SE.
Le tarif est conséquent pour seulement 9 W, mais c’est l’exemple type de l’appareil très coûteux à fabriquer : transformateurs de haute qualité, alimentation à selfs onéreuse, qualité des composants, et finition premium loin de certains produits à l’apparence bien ordinaire.
Faisant partie du grand groupe Kyodo Denshi Engineering Co, Phasemation en est le joyau musical, maîtrisant à la perfection la conception de ses produits.
Le SA-1500 est fait dans les règles de l’art par un grand connaisseur en la matière, ex-PhaseTech, pour un prix qui paraît finalement justifié.
Non, ce nouveau SE de 300B Phasemation SA-1500 n’est pas fait pour tout le monde, mais pour les esthètes qui exigent d’abord une véracité des timbres supérieure, une vie musicale de tous les instants, et l’aération sonore incomparable de la triode en simple étage, au prix d’une puissance réduite.
Mais il ne faut pas trop se focaliser sur les 9 W sur le papier, car il est carrément bluffant sur certaines enceintes peu sensibles mais adaptées.
Ce bel objet couleur champagne vous transportera dans un monde où bien peu d’électroniques peuvent vous embarquer, unissant intimement beauté artistique et musicale — magique pour beaucoup.
Timbre
8
Dynamique
8
Scène sonore
8
Qualité / prix
7
Plaisir musical
Facilité d'utilisation
Qualité de fabrication
Puissance : 9W/4ohms
Dimensions : 430x240x380mm
Poids : 18kg
Tubes : 6SN7JJ&300BPSVane
Impédance de sortie : 4-8ohms
Impédance d’entrée : 47K
Gain : 30dB
Réponse : 10Hz-40kHz
