Et s’il restait encore des chansons inédites de Sinatra ? Pas des démos, ni des bouts de sessions oubliées, mais de véritables morceaux, entièrement arrangés pour lui dans les années 1950 et 60, jamais enregistrés. Ce fantasme de collectionneur est aujourd’hui une réalité tangible grâce à un projet étonnant porté par… Seth MacFarlane.
Un héritage enfoui dans les archives
Au départ, il s’agissait de partitions oubliées. Des orchestrations signées par les grands arrangeurs de l’époque – Nelson Riddle, Billy May, Johnny Mandel – destinées à être interprétées par la voix de Sinatra, mais mises de côté, inachevées, ou tout simplement jamais exploitées. Conservées dans des cartons, à l’abri du temps, elles auraient pu sombrer dans l’oubli. C’était sans compter l’initiative de Tina Sinatra, qui, après la disparition de son frère Frank Jr., a confié ces trésors à MacFarlane.
L’acteur et créateur de Family Guy est depuis longtemps un amoureux des crooners, et pas un imitateur de plus : avec ses précédents albums de jazz vocal, il a montré qu’il comprenait ce langage, cette diction, cette manière de faire swinguer les mots comme les notes. Il était donc bien plus qu’un simple admirateur ; il est devenu un véritable passeur.
Une immersion sonore à l’ancienne
Le projet Lush Life: The Lost Sinatra Arrangements ne se contente pas d’exhumer des partitions. Il rend hommage à une esthétique, à une manière d’enregistrer. Les morceaux ont été captés en analogique, sur bande, dans les studios de la Fox, avec un orchestre de 70 musiciens. Un clin d’œil respectueux aux méthodes d’époque, pour recréer cette chaleur organique et ce velouté sonore propres aux enregistrements Capitol du Sinatra de la grande époque.
Le répertoire, lui, mélange standards peu connus et pépites oubliées. On y retrouve des orchestrations somptueuses, avec ces couleurs harmoniques riches, ces contrechants de cordes et de vents qui faisaient tout le raffinement des sessions de l’âge d’or. Ce n’est pas une imitation, c’est une continuation : la voix de MacFarlane n’essaie pas d’être celle de Sinatra, mais elle s’en inspire avec justesse, et surtout, elle respecte le souffle de ces arrangements.
Ce qu’on en pense
Il y a quelque chose de profondément émouvant dans ce disque. Ce n’est pas un simple exercice de style, ni un album hommage de plus. Ce que MacFarlane parvient à faire, c’est redonner vie à des intentions musicales restées muettes pendant près de soixante-dix ans.
Et ce n’est qu’un début. D’après MacFarlane, les cartons contiennent encore de quoi produire deux à trois albums. Si la suite est du même niveau, on peut parler d’un véritable legs artistique, sauvé in extremis du silence.