LINE MAGNETIC LM-812 ICONIC

Après une présentation en exclusivité mondiale des enceintes Line Magnetic LM-812 Iconic à la dernière édition du salon Haute Fidélité, nous avons la grande chance d’en rédiger le tout premier banc d’essai. Le retour du pavillon et du haut rendement à la mode du cinéma parlant des années 1940 nous a complètement conquis.

C’est en 2005 que les frères Zheng décident de créer Line Magnetic Audio Co Ltd pour développer différentes gammes de produits électroniques et acoustiques. Plusieurs familles de produits se partagent les pages du catalogue, mais la plus délirante est la série Classic qui inclut des reproductions de matériel Western Electric, comme les amplificateurs mono à triode 300B 91A (single ended) et 86A (push-pull), ou des variations créées par Cai, le frère aîné, reposant sur des concepts Western Electric, comme le bloc WE41.2 à monotriode 212 fabriqué sur commande uniquement. Quatre modèles d’enceintes dont trois d’inspiration ancienne comme le LM-812 Iconic de ce banc d’essai sont désormais proposés.

L’héritage du passé

Le modèle LM-812 Iconic n’est pas à proprement parler une enceinte domestique dans le sens compact du terme. Nous étions prévenus, les frères Zheng ont voulu revenir aux sources de la restitution sonore. À l’époque où le cinéma passait du muet au parlant, les concepteurs se reportaient aux règles fondamentales de la physique qui indiquaient que la reproduction du grave nécessitait soit un panneau plan immensément grand, à l’image de l’enceinte de cinéma Western 75W5 datant des années 1930 et équipée de quatre boomers de 46 cm montés sur un gigantesque baffle ouvert, soit une charge de très grand volume avec ou sans pavillon, comme l’enceinte Lansing Iconic de 1937 à l’origine de la LM-812 Iconic.

L’enceinte Lansing Iconic est considérée à ce jour comme une des enceintes qui a le plus marqué l’histoire de la reproduction sonore. Pour la première fois, une enceinte de dimensions réduites offrait une haute sensibilité et une réponse en fréquence extrêmement linéaire entre 40 Hz et 10 kHz à partir d’une configuration à deux haut-parleurs.

À l’origine, elle fut conçue par James Lansing à la demande des premiers studios d’enregistrement qui ne pouvaient utiliser des systèmes de la taille des Western 75W5. Partant d’une feuille blanche, James Lansing et John Blackburn imaginèrent une enceinte accordée en bass-reflex à partir d’un boomer Lansing 815 de 38 cm à excitation développé spécifiquement pour l’enceinte. Il était relayé autour de 800 Hz par un moteur Lansing 801 à excitation chargé par un pavillon à huit cellules. Le résultat sidéra la profession par la compacité (relative) de l’enceinte et les performances globales obtenues, le modèle rencontra un succès énorme auprès des professionnels.

Enceinte iconique

Line Magnetic a donc repris le principe de l’enceinte originale tant au niveau technique qu’au niveau esthétique, d’où l’allure extrêmement similaire de l’élève par rapport au maître. On retrouve donc une ébénisterie très imposante en bois multiplis sur laquelle est posé solidement le transducteur de médium aigu à pavillon.

Un encadrement en tasseaux placé sous l’enceinte fait office de socle et décompresse la face inférieure de celle-ci. Les parois de la boîte ne sont pas renforcées, en revanche une couche de mousse synthétique recouvre entièrement l’intérieur afin d’assurer un minimum d’amortissement. Un gros tasseau posé latéralement à l’arrière rigidifie un peu la structure, la face arrière est vissée sur un cadre rapporté en tasseaux et le moteur ferrite du haut-parleur de grave repose sur un piétement en bois fixé au fond de l’enceinte.

Ce n’est pas un 38 cm mais un modèle de 46 cm maison qu’a choisi Line Magnetic, le LM-808 à membrane rigide en pulpe de cellulose, un choix guidé par la recherche de la plus grande sensibilité à la plus basse fréquence possible. Il passe le relais autour de 600 Hz à une chambre de compression Line Magnetic LM-802B qui reprend la structure interne du moteur 802 avec un aimant Alnico et une gorge de diamètre de 1,75 pouce, soit 44,45 mm.

Il est couplé à un pavillon multicellulaire en fonte d’aluminium LM-Iconic-812, copie quasi conforme du pavillon de l’Iconic de 1937. L’ensemble est solidement ancré à un châssis triangulaire lourd et coulissant, trois molettes permettent de régler précisément la position en profondeur (la mise en phase) de ce haut-parleur. Le filtrage du second ordre est placé au bas et au dos de l’enceinte, il aboutit à un bornier simple. La chambre est raccordée à un bornier à vis par un câble fourni qui offre la possibilité d’ajuster le niveau au-delà de 600 Hz selon trois positions : -2, 0 et +2 dB.

Fabrication et écoute

Construction : Si le constructeur a repris l’esprit et la philosophie du modèle original, il en a repris aussi la méthode de construction assez basique. La LM-812 Iconic bénéficie toutefois de matériaux modernes et d’un assemblage qui permet à la caisse de ne pas résonner outre mesure. La réalisation est donc de bonne facture, le système de maintien et de réglage de la chambre et du pavillon sont en revanche de haute qualité. Le fait que la face arrière soit amovible offrira l’opportunité aux futurs possesseurs d’envisager sereinement quelques upgrades. À la réflexion, c’est probablement ce que les frères Zheng ont imaginé eux aussi…

Composants : Les haut-parleurs mis en place dans l’enceinte sont de très belle qualité. Le fabricant n’a pas cherché à réinventer la poudre et a intelligemment dupliqué en version moderne des modèles de la plus haute considération historique. Le moteur de médium aigu notamment reprend les bases du modèle Altec Lansing 802, une référence parmi les références incontournables dont il faut rappeler qu’elle a été fabriquée jusqu’en l’an 2000 (sous l’appellation 902 depuis 1977 avec l’adoption d’un aimant ferrite).

Grave : C’est la première fois que nous écoutions un haut-parleur de 46 cm au sein d’une enceinte haute-fidélité. Le comportement d’un tel transducteur en termes de poids de membrane et de retour de courant vers l’amplificateur demande précisément de la part de l’amplificateur un certain « self-control ». Concrètement, la LM-812 Iconic ne fonctionnera pas forcément avec toutes les électroniques. Nous les avons écoutées le dimanche matin au salon Haute Fidélité avec un intégré à tubes 845 en simple étage avec un résultat sonore remarquable en bas, et il a fallu notre bloc repère helvète pour arriver à produire un grave de qualité au magazine. Le facteur d’amortissement ne semble donc pas l’unique critère à prendre en compte… La pression sonore est élevée et tout autre que celle d’un petit boomer de 17 cm. Le grave descend avec puissance, du contrôle et un bon détourage sans exciter la caisse de manière dramatique, et ça donne une sacrée épaisseur au message. L’extrême grave est quasiment absent sur les accords très bas de la contrebasse sur « Jardin d’hiver » en public par Stacey Kent, mais l’instrument conserve une assise et un volume virtuel parfaitement crédibles.

Médium : Rares sont également les chambres de compression à pavillon qui ont atterri dans notre auditorium. Grâce aux Line Magnetic, le rêve est devenu réalité. Nous avons ajusté le niveau sur +2 dB de manière à retrouver un équilibre subjectivement linéaire à l’écoute. Quelle richesse de timbres ! Quelle définition ! Quelle magie harmonique ! On a l’impression d’entendre tout, absolument tout ce que contient le signal musical. Des détails à revendre, un positionnement spatial incroyablement tridimensionnel et quasiment tactile de chaque note de la performance. La soprano Anna Netrebko se tenait debout entre les deux enceintes, avec une émotion palpable à chaque parole prononcée du « Un bel di Vedremo » de Madame Butterfly. Du pur bonheur.

Aigu : Annoncée pour monter à 20 kHz, la LM-812 Iconic ne nous a pas paru monter très haut dans l’aigu même avec le réglage modifié à +2 dB. À l’image de l’extrême grave, l’extrême aigu est court et le filé un poil limité, ce qui produit in fine un équilibre tonal stable, linéaire et très crédible. Et malgré cette limitation haute, la qualité de l’analyse harmonique et le fouillé insufflé par la très haute sensibilité produisent une texture épaisse et des extinctions de notes très documentées quoique légèrement plus courtes comparées à nos enceintes repères. Néanmoins, le rendu des ambiances est d’un réalisme étonnant.

Dynamique : Les capacités dynamiques des Line Magnetic ne déçoivent pas, bien au contraire. Le moindre impact est restitué avec une ébouriffante sensation de puissance sans jamais avoir l’impression que les enceintes ne puisent dans leurs réserves. Le toucher vif de Pavel Kolesnikov interprétant les Mazurkas de Chopin est restitué avec toute la nervosité et toute l’énergie instantanée voulues par le compositeur. Malgré la relative lourdeur du boomer, celui-ci ne déstabilise pas la belle fusion globale des registres même à bas niveau d’écoute. Son grand diamètre et sa haute sensibilité démontrent leurs vertus, les gros tambours brésiliens sur « Jardin d’hiver » en public ne perdent rien de leur volume virtuel quand on écoute en sourdine.

Attaque de note :Les LM-812 Iconic sont particulièrement rapides grâce à l’intervention des chambres de compression dès 600 Hz. On assiste à une déferlante harmonique parfaitement cohérente depuis le bas médium, zone importante à l’écoute où les harmoniques les plus bas reproduits par la chambre et son pavillon réorganisent et vitalisent le message du haut-parleur de grave, jusque dans l’aigu. Une fois encore, la très haute sensibilité apporte sa pierre à l’édifice de la réactivité des enceintes.

Scène sonore :La technique du pavillon implique quelques contraintes de positionnement du fait de la directivité plus prononcée des enceintes. Après plusieurs essais, nous avons finalement opté pour une orientation des centres émissifs vers la zone d’écoute de manière à obtenir un croisement des axes virtuels de diffusion juste devant nous. Dans ces conditions qui tracasseront probablement les acquéreurs de LM 812 Iconic disposant de petites pièces, on obtient une scène majestueusement holographique et un étagement des plans d’une remarquable précision. L’effet de présence est véritablement saisissant sur les voix, et l’énergie dans le grave rend l’atmosphère du lieu de la performance quasiment palpable. Superbe.

Transparence :Loin d’être les plus neutres et les plus transparentes des enceintes que nous avons pu tester à ce jour, les LM 812 Iconic sont certainement parmi les plus magiques et les plus désirables passées dans notre auditorium. Il est extrêmement difficile de ne pas être envoûté par cette approche sonore basée sur la sensation de réalisme, sur l’émotion à fleur de cône que si peu d’enceintes même extrêmement coûteuses n’arrivent pas à transmettre.

Rapport qualité/prix :Inutile de tergiverser, ces grosses enceintes ne s’adressent pas à la majorité d’entre nous, leur façon de reproduire le son non plus et leur mise en œuvre demande une sélection attentive de l’amplificateur qui va les driver. Trois contraintes à surmonter qui en décourageront plus d’un. Autant être prévenu. Mais l’amateur de concert, de sensations et d’émotions ne sera déçu ni par leurs prestations ni par leur prix « réaliste ».

Verdict

Merci ! Merci à BC Diffusion, le distributeur, d’avoir ajouté Line Magnetic à son escarcelle de produits. Déjà emballés par les électroniques à tubes, nous avons craqué pour ces enceintes d’un autre temps mais tellement séduisantes à l’écoute. Leur allure vintage, l’ébénisterie à l’ancienne et l’usage de haut-parleurs « comme avant » à haute sensibilité concourent à créer un énorme capital sympathie. Puis il suffit de les écouter pour tomber définitivement sous leur charme. Loin de tout reproche, mais musicalement magnétiques. On adore !

Fiche technique

Origine : Chine
Prix : 12 999 euros (la paire)
Dimensions : 720 x 1 180 x 590 mm
Réponse en fréquence : 37 Hz à 20 kHz
Sensibilité : 102 dB/W/m
Puissance nominale : 40 W
Impédance nominale : 8 ohms

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